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C’est à la fois une faillite politique, bancaire, et politique pour l’Europe.

Tribune de Maître Pierre Farge publiée dans La Tribune

Cela fait plus de six mois que l’Italie parlemente sur l’organisation de son parlement. L’objectif était de garantir enfin la stabilité gouvernementale pour mettre fin à plus de 60 législatures en 60 ans, mais aussi accélérer l’adoption des lois et renforcer son exécutif.

Le choix d’hier vient de mettre fin à ces discussions byzantines et paradoxalement assurer l’exact inverse pour les prochains dix-huit mois.

Un des principaux points de cette réforme constitutionnelle visait notamment la fin du bicamérisme parfait. Autrement dit, savoir si le palais Madame (Sénat) aurait autant de pouvoir que le palais Montecitorio (Assemblée nationale).

Cette révolution de palais n’a pourtant pas convaincu les italiens, davantage préoccupés par 12% de chômage (40% chez les jeunes) et des perspectives de croissance toujours inférieures à 1% (sans compter une croissance par habitant équivalente à celle de 1997).

Une triple faillite pour l’Italie

Après le succès de son Italicum en 2015, Matteo Renzi s’est cru trop fort pour pouvoir échouer. Pourtant, son referendum transformé en vote de confiance est une triple faillite : politique, bancaire et européenne.

 Faillite politique

Faillite politique puisque le Président du Conseil des ministres a démissionné avant même les résultats définitifs du matin. Le parlement sera certainement dissout dans les prochains jours et le pays deviendra alors ingouvernable.

La forte prime majoritaire pour la Chambre des députés prévue par l’Italicum est en effet impossible avec un Sénat qui demeure puissant élu à la proportionnelle (en supposant la légalité de cette réforme encore soumise à l’appréciation de la cour constitutionnelle).

A défaut de trouver une loi électorale et de procéder à des élections anticipées courant 2017 ou fin de la législature 2018, cela laisse de quoi s’amuser au comique Beppe Grillo et ses amis du M5S.

 Faillite bancaire

En l’absence d’un gouvernement crédible, l’Italie plongera dans une crise bancaire qui fera couler l’Union européenne.

La plus vieille banque du monde encore en activité, et troisième institution d’Italie, Monte Dei Paschi di Siena sera victime de sa sous-capitalisation et du triplement de ses créances douteuses ses dix dernières années.

Si la réaction des investisseurs était déjà glaciale dans son opération de la dernière chance pour lever un milliard d’euros, nous sommes maintenant certains qu’ils ne se tourneront plus vers l’Italie, voire même que ceux encore existant se retireront aggravant ainsi le marasme.

Par ailleurs, le plan de sauvetage national prévu à hauteur de 5 milliards d’euros est moins sûr que jamais (un conseil d’administration est prévu demain). Pourtant, cette nécessité n’est pas isolée puisque quatorze des plus grandes banques italiennes détiennent près des deux tiers de toute les créances douteuses de la zone euro.

 Faillite de l’Europe

Cet échec politique et cette faillite bancaire aura des conséquences considérables sur la situation de l’Union européenne et de l’euro zone. En témoignent déjà les turbulences des dernières heures sur les marchés, allant du plongeon de l’euro face au dollar à l’effondrement de l’indice de Milan et de Tokyo.

Autrement dit, après parlementer sur l’organisation de son parlement, l’Italie oblige maintenant à parlementer sur le sort même de l’Europe.

Affaiblie par une crise grecque retentissante, puis d’un Brexit fracassant, voici donc la crise italienne plus silencieuse mais non moins grave puisque c’est de la sortie du troisième pays de la zone euro dont il est question.

Sans compter que cette nouvelle donne rend immédiatement obsolète les deux programmes économiques des favoris à l’élection présidentielle, Emmanuel Macron et François Fillon.

Par Maître Pierre Farge.

 

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