Le juge des référés condamne la Préfecture de police à obtenir un rendez-vous pour la cliente de maître Pierre Farge, avocat engagé et lanceur d’alerte face aux menaces que la bureaucratie fait peser sur l’état de droit.
Article de Frédéric MAS rendant compte de la décision obtenue par Pierre Farge publiée également dans Contrepoints
Condamnation de la Préfecture de police en référé
L’inertie administrative, que la crise sanitaire n’a fait qu’aggraver (*), vient d’être condamnée dans le domaine du respect des droits fondamentaux communs aux citoyens français et aux étrangers.
Maître Pierre Farge, qui intervient régulièrement dans les colonnes de Contrepoints, a obtenu après une procédure dite de « référé conservatoire », la condamnation de la Préfecture de Paris pour son incapacité à respecter le droit en vigueur en matière de délivrance de titre de séjour le 4 février 2021.
La cliente marocaine de maître Farge a fait valoir devant le juge qu’elle ne pouvait obtenir le rendez-vous en préfecture nécessaire à l’obtention du fameux sésame administratif qui lui permet de travailler sur le sol français.
En cause, une situation d’exception, la crise sanitaire, qui oblige les requérants à passer par un site internet unique qui fonctionne assez moyennement, et surtout ne permet pas d’obtenir de rendez-vous dans les meilleurs délais pour résoudre une situation d’urgence.
Ce problème fragilise la situation de madame A. H. comme celle de milliers d’autres étrangers en situation irrégulière.
Le site internet unique
« Il n’est pas contesté que le refus de lui donner le rendez-vous qu’elle sollicite la place dans une situation des plus précaires dès lors qu’elle doit pouvoir justifier de la régularité de sa situation sur le territoire français dans l’attente de l’instruction de son dossier. »
La situation personnelle de la cliente de Me Farge demandait un traitement d’urgence, que le passage obligé par le site internet ne permettait pas d’obtenir.
Maître Farge a à plusieurs reprises alerté sur la manière dont l’État bureaucratique fabriquait des travailleurs clandestins et méprisait leurs droits par son peu d’empressement à traiter les demandes de régularisation dans le cadre posé par la loi :
« […] C’est bien de politique migratoire dont il s’agit ici, d’instructions d’élus ou de préfets, demandant sans doute d’agir au mépris de nos droits en obligeant les étrangers à saisir un juge s’ils souhaitent vraiment régulariser leur situation. Faites le calcul, combien d’étrangers iront jusqu’à engager les frais d’un avocat, ou tomber sur un confrère prêt à agir bénévolement ? Un sur dix ? Un sur cent ? Un sur mille ? L’intérêt pour la Préfecture à épuiser procéduralement les étrangers est évident pour ne pas espérer que ces pratiques changent. ».
Parce que la loi doit être la même pour tous, et qu’elle doit protéger les droits fondamentaux de tous les individus, cette décision est salutaire.
Pierre Farge, Avocat au Barreau de Paris.
(*) Avant la crise sanitaire, le Service d’accueil des étrangers de la préfecture de police de Paris recevait pas moins de 600 000 personnes par an, à la préfecture de police et dans 6 autres antennes à Paris, essentiellement pour des demandes ou des renouvellements de titres de séjour.
Ce service a « rouvert ses portes » au public le 15 juin 2020, après 3 mois de fermeture quasi-totale pour cause de confinement, mais avec une restriction de taille : l’accueil « physique » des usagers est désormais réservé aux rendez-vous pris en ligne sur prefecturedepolice.interieur.gouv.fr … ce fameux site où il est devenu matériellement impossible d’obtenir un rendez-vous !
Une situation dénoncée de toute part, comme par exemple ici par France Bleu Paris en décembre dernier :
ou bien la Ligue des Droits de l’Homme :