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Dans l’affaire Abad, au nom de la présomption d’innocence, rien n’autorise de réclamer une sanction comme une démission, ou plus simplement salir une image.

Tribune de Maître Pierre Farge publiée dans Contrepoints

La formation du nouveau gouvernement entraîne son lot habituel de révélations sur la vie des ministres. La dernière d’entre elles vise Damien Abad pour de présumées violences sexuelles… datant de plus d’une décennie, et déjà classées sans suite par la justice.

Malgré le rapport d’octobre 2021 de l’ancienne garde des Sceaux Élisabeth Guigou sur la protection de la présomption d’innocence mise à mal par la presse, ce principe est de nouveau piétiné quelques jours après la formation du gouvernement avec la mise en cause d’un nouveau ministre.

Ancien député de l’Ain et Président LR, c’est curieusement lorsqu’il est nommé membre du gouvernement que son passé refait subitement surface, comme si les plaignantes retrouvaient la mémoire en le voyant sur le devant de la scène.

Il est important de respecter la présomption d’innocence. Fort du phénomène #MeToo, la voix des victimes est entendue plus que jamais partout en France, et c’est une excellente nouvelle que la justice puisse être rendue plus utilement et plus rapidement. Pour autant, cette libération de la parole doit intervenir dans le respect d’un des principes les plus fondamentaux de notre droit : la présomption d’innocence.

Et en l’espèce, la présomption d’innocence devrait avoir un sens d’autant plus important que ces deux femmes ont porté plainte pour viols entre 2010 et 2011, plaintes donnant lieu à deux classements sans suite en 2012 et en 2017.

Attention à la justice populaire.
Partant, rien n’autorise – sinon peut-être la volonté de faire polémique et vendre du papier – de réclamer une sanction comme une démission, ou plus simplement salir une image.

Sauf donc à considérer que n’importe qui peut se faire justice lui-même en un tweet ou une simple déclaration péremptoire dans un média, l’institution judiciaire demeure garante du respect de cette présomption d’innocence, des suites qu’elle donne, ou non, à une plainte conformément au droit en vigueur.

Pierre Farge.

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